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mardi 4 octobre 2011

Le jeu vidéo et l’intermedia : A la frontière de l’art ? (partie 3)

Les jeux vidéo et le cinéma

 Le jeu vidéo est depuis sa création est en manque de reconnaissance artistique et cela pour une simple raison, la plupart des individus ne jouant pas ou s’intéressant peu au média, n’ont bien souvent pas conscience du véritable potentiel artistique qu’il détient. Chaque individu sait ce qu’est capable de véhiculer la littérature, le cinéma, la poésie ou bien le théâtre, à savoir une infinité d’histoires, d‘expériences à vivre, de connaissances et de sentiments. Mais qu’offre un médium tel que le jeu vidéo ? De l’interactivité, de l’amusement… et puis après ? Bon nombre de personnes et même ceux qui utilisent le médium ne voient dans les jeux vidéo, et cela reste néanmoins l’une des bases primordiales de tous jeux, qu’un très bon moyen de s’amuser avec un logiciel aussi ludique qu’interactif. Après tout, il ne faut pas oublier que l’un des buts premiers d’un jeu vidéo est essentiellement d’amuser celui qui l’utilise. À quoi bon avoir une histoire passionnante et des graphismes impressionnant si l’interaction ne permet pas au joueur de s’amuser — à minima — d’une manière ou d’une autre, de lui procurer du plaisir à parcourir le jeu en lui proposant challenges et récompenses. Le joueur serait assurément frustré face à un tel manque d’amusement. 

Mais s’arrêter au simple divertissement reviendrait à écarter le véritable potentiel de ce média et oublier que certains jeux vont bien au-delà que de procurer qu’un simple divertissement au joueur, nous l’avons vu au travers de ces quelques exemples que sont Silent hill 2 ou ICO capables de faire ressentir au joueur toute une palette d’émotions plus différentes les unes que les autres. 


Plus encore, le jeu vidéo peut être vu comme un médium à la croisée des chemins de tous les autres et bien plus encore et c’est peut-être bien pour cela qu’il est aujourd’hui si difficile de le cerner. Le jeu vidéo est un médium vaste, capable d’emprunter et de toucher à tous les autres arts en les combinant de plus en plus naturellement, notamment grâce aux nouvelles technologies, puis en les transcendants par son incroyable pouvoir d’interactivité. L’histoire de l’art en général est une histoire d’emprunt, le théâtre a emprunté à la littérature, le cinéma a emprunté au théâtre. Le jeu vidéo, dernier né des industries culturelles, ne fait donc pas figure d’exception et emprunte, depuis presque toujours, copieusement à ses aînés. 




Il est donc, dans l’ordre des choses, de voir les jeux vidéo emprunter à ses ainés ce qui a fait d’eux des arts et notamment de son plus jeune ainé qui n’est autre que le cinéma. Le fait que le jeu vidéo aujourd’hui se rapproche du cinéma, de par ses histoires impliquant de plus en plus le joueur et ses cinématiques, n’est pas un fait anodin. Bien au contraire, il s’agit pour le jeu vidéo d’une part de se voir octroyer son statut d’art comme l’est considéré son ainé, mais d’autre part parce que cet emprunt au cinéma était de toute façon inévitable. L’industrie du jeu et du cinéma ont presque depuis toujours partagé des liens économiques et sociaux. 


Alors que les jeux vidéo commençaient à peine à émerger dans les foyers et à envahir les salles de jeu, certaines grandes majors de l’industrie cinématographique Hollywoodienne s’intéressaient déjà aux revenus à forte croissance dégagée par ce divertissement et n’hésitèrent pas investir leurs capitaux dans le média. Petit à petit l’industrie du jeu et du cinéma — ces industries de « l’entertainment » — se sont vue rapprochée tout naturellement par leur complémentarité économique et leur capacité synergique à vendre massivement des univers, des histoires et leurs personnages sur nos écrans, si bien qu’il est impensable aujourd’hui, de ne pas voir la sortie d’un blockbuster Hollywoodien accompagné de son homologue vidéoludique. Et l’inverse est d’autant plus vrai, de plus en plus de jeux font désormais l’objet d’une adaptation filmique au cinéma, de même que de nombreux films empruntent certains codes visuels ou narratifs propres au jeu vidéo. Certains réalisateurs vont même jusqu’à collaborer ou participer au processus de développement d’un jeu, voire, comme cela a été le cas avec Guillermo Del Toro, de se transformer pour l’occasion en véritable game designer. 



Il à donc toujours été dans la nature même des jeux vidéo de raconter des histoires, de partager des expériences de plus en plus élaborées et n’ayant bientôt plus rien à envier à celles véhiculées par le cinéma. Le seul terme de Cinématique évoque déjà la forte affiliation entre les deux médias et certaines techniques comme la motion capture permettent à l’heure actuelle d’intégrer des gestuelles et des comportements humains de plus en plus crédibles dans un jeu. Le cas, L.A Noire, montre qu’il est aujourd’hui possible d’offrir au joueur une histoire et une expérience interactive aux ambitions cinématographiques d’envergures. Au point de voir ce titre entrer pour la première fois dans l’histoire du jeu vidéo, en compétition dans un festival dédié au cinéma indépendant. Les déclarations de Geoff Gilmore responsable du festival à propos du jeu, illustrent parfaitement les enjeux dont il est question avec l’intermedia et les jeux vidéo : « ce que Rockstar et Team Bondi ont accompli avec LA Noire n’est rien moins que révolutionnaire. C’est une invention d’un nouveau royaume de la narration, en partie cinéma, en partie jeu vidéo, et un tout nouveau domaine d’expression narrative, d’interactivité et d’immersion. Nous sommes au bord d’une nouvelle frontière ».

Vers de nouvelles frontières

  C’est bien de cette « frontière » dont il est question avec l’intermédia. Un jeu comme Heavy Rain ou L.A Noire sont les parfaits exemples du jeu ayant réussi à s’inscrire dans le mouvement d’intermédia puisque l’expérience proposée par le jeu arrive notamment à combiner, ou plutôt, à former un tout presque unique et autonome, entre le cinéma et le jeu vidéo. De cette façon, Heavy Rain, plus encore que L.A Noire, dépasse son propre médium qui est celui du jeu pour ne former qu’une seule et même entité avec la forme cinématographique. Il ne s’agit plus seulement de croisement entre deux médias et de l’introduction d’une cinématique entre deux phases de jeu comme la plupart des jeux le font, mais véritablement d’un assemblage homogène des techniques propres à ces deux médias au point de ne pratiquement plus pouvoir les discerner. Cet assemblage commence par l’introduction même du texte cinématographique et donc d’un scénario qui sera en permanence lié au gameplay. 


Dans Heavy Rain l’interaction entre le joueur, le spectateur et l’œuvre est possible. Le joueur peut plus ou moins contrôler ce qui se déroule sous ses yeux, il est spectateur, mais aussi acteur de cette histoire. Ses choix, ses actions auront un véritable impact sur le jeu et changeront le cours de l’histoire qu’il est en train de vivre. À l’heure actuelle, il semble qu’il soit encore impossible d’obtenir des rapports aussi forts et directs qu’entretiennent les jeux vidéo avec le spectateur — exception faite des Happenings — au théâtre ou encore au cinéma. C’est véritablement là qu’est la grande force de ce média : donner la possibilité au joueur d’agir sur l’histoire.

  


  Dans un jeu comme Heavy Rain, l’importance du texte va prendre toute son ampleur. Le scénario écrit par joue un rôle primordial dans le processus de création du jeu. Le texte ici est plus que jamais indissociable de la mise en scène. D’autant plus que l’un influe constamment sur l’autre, ils sont alors complémentaires et ne peuvent que fonctionner ensemble. Il s’agit en permanence de veiller à ce que le langage scénaristique fonctionne à l’écran, trouver un langage scénique traduisant au mieux le texte écrit. Ce procédé pousse donc les créateurs du jeu à avoir une écriture très visuelle, sans pour autant savoir exactement ce que donnerait le résultat final. Car contrairement au tournage d’un film où le réalisateur à constamment l’œil à la caméra et peut visualiser les rushs pour juger immédiatement de la qualité de la scène tournée, le processus de création du jeu lui est beaucoup plus complexe. Pour se rendre compte de ce que pourrait donner le jeu en action, en images, le processus de création d’un jeu passe par de nombreux prototypages, primordiaux, qui la plupart du temps coûtent cher à mettre en œuvre. De la même manière qu’un réalisateur, le game designer est entouré de nombreuses personnes qualifiées pour créer les scènes qu’il a pu imaginer au préalable. Certaines questions se posent donc, la réalisation ne risque t’ » elle pas, au fur et à mesure que le processus de création avance, de s’éloigner de l’origine du texte ? Peut-être pourrait-elle le trahir, et ne pas lui être assez fidèle ?

Le processus de création d’un jeu n’est — à de nombreux égards — pourtant pas très différent de celui du film. Dans le cas d’Heavy Rain, le game designer David Cage semble, par certains aspects, se poser finalement, comme le réalisateur et le metteur en scène de son texte. Comme tout metteur en scène, Cage veille aussi sur les acteurs qui vont prêter leurs corps, leurs visages et leurs voix aux personnages du jeu. Ce sont d’ailleurs les acteurs les véritables porteurs du texte. Car c’est par eux que va s’adresser le texte au spectateur. C’est aussi par eux que les émotions décrites dans le texte vont se dégager et ce sont encore eux qui vont rendre ce texte « vivant ». Comme dans tout processus créatif nécessitant un jeu d’acteur, ces derniers, au cœur de la représentation, jouent donc un rôle primordial dans la bonne transmission du texte au spectateur. Il était donc essentiel pour David Cage de diriger au mieux ses acteurs, en les guidant, en les conseillant et en les menant là où il le souhaitait, afin d’obtenir de façon visuelle ce qu’il avait été écrit dans le scénario. 

En outre, le concept d’interactivité suscite de multiples rapports entretenus par le jeu avec le texte, le spectateur et notamment le rapport texte-représentation, bien souvent problématique et posant certaines contraintes. Mais avec Heavy Rain le spectateur devient donc aussi l’interprète. En découle le fait que ce dernier va se confronter lors du jeu, à des choix et donc des conséquences diverses qui vont se répercuter directement sur le déroulement de l’histoire. En d’autres termes, le spectateur va concrètement interagir avec le texte en vue de modifier le cours de l’histoire qui se déroule sous ses yeux ; il va agir sur le texte et en modifiera directement sa représentation visuelle. Certes le texte est au préalable écrit, mais les multiples canevas et aléas qu’il offre permettent autant de multiples et différents sens de lecture de ce dernier. Plus que jamais ici, le texte et sa représentation peuvent faire l’objet de multiples relectures, uniques pour chacune d’entre elles, toutes manipulées par le joueur. Les scènes deviennent entièrement interactives. L’interactivité ici entretient un triple rapport qui fonctionne comme un cercle dont le cycle se renouvelle sans cesse : le spectateur agit sur le texte qui lui-même agit sur la représentation qui elle-même va agir à son tour sur le spectateur. Ce dernier ayant visualisé et emmagasiné un certain nombre de données, d’émotions ou encore de questions, va ensuite agir sur le texte en conséquence. Le processus se répète ainsi (en écartant les interruptions de jeu) jusqu’à la fin de l’histoire. Par conséquent, aucune limite n’est posée entre ces trois rapports et donc entre la représentation et le texte. 

Là où le rapport représentation texte pose au théâtre, certain de ses paradoxes, ses contradictions, Heavy Rain les relie par l’interaction. Les barrières entre le texte et la représentation sont littéralement dépassées, car le spectateur-interprète manipule directement le texte préexistant et agit par conséquent spontanément sur la représentation de ce dernier. Là où le théâtre peut privilégier l’un de ses deux rapports, Heavy Rain et le jeu vidéo en général, peut n’en privilégier aucun et au contraire doit les concilier dans le but de faire interagir le spectateur.

Après la pluie, le beau temps

Dans la continuité de ces rapports, il me semble primordial de s’attarder sur le rapport spectateur-représentation. Le but premier d’un jeu comme Heavy Rain — et comme tout autre jeu et œuvre créative — est de pouvoir procurer aux joueurs, aux spectateurs ou aux lecteurs, une expérience. Une expérience basée sur des émotions, des sentiments, un esthétisme ou encore des éléments de réflexion. La meilleure récompense pour un créateur est celle d’avoir réussi à transmettre des émotions, de manière désinvolte ou non, peu importe, du moment que l'œuvre en question implique des réactions, des émotions et des questionnements. 


Heavy Rain comme tout travail créatif tend donc à prendre cette direction et va impliquer le joueur à ressentir, à réfléchir sur ses choix ou encore ses actions. Mais le jeu parvient-il réellement à faire réagir et penser le joueur ? N’a-t-il pas cette position passive que le spectateur peut avoir devant tant de réalisme aussi immersif soit-il ? 



Bien souvent aujourd’hui on donne tout à voir, et à vivre pleinement la représentation au spectateur, comme cela se produit au cinéma par exemple, mais peut-être qu’il n’est pas assez souvent amené à se questionner sur ce qu’il voit ou tout simplement parce que ce n’est pas le but recherché. C’est le problème que s’est notamment posé Bertolt Brecht, à l’égard de certaines représentations théâtrales qui impliquaient trop le spectateur — parce que bien souvent trop mimétique, trop naturaliste — parfois au détriment du texte. Le spectateur ne s’interrogeait plus sur ce qu’il voyait. Il ne s’interrogeait plus sur le texte, noyé par toute cette scénographie réaliste jusque dans les moindres détails, ces décors d’illusion et ses acteurs au jeu naturaliste. Avec l’effet de distanciation, Brecht incitait le spectateur à une prise de conscience de l’œuvre, du texte et de ses problématiques, en l’amenant à réfléchir sur ce qu’il était en train de voir et d’écouter, et était directement interpellé. Au final, Heavy Rain utilise une méthode à l’extrême opposée de celle employée par Brecht et qui pourtant fonctionne aussi — dans le but identique qu’est celui d’amener le joueur/spectateur à ressentir tout en se questionnant — grâce à l’interaction. Grâce au concept ’interactif et narratif d’Heavy Rain, le joueur va être touché au plus près de ses sentiments. 



L’interactivité ici, pousse et incite d’autant plus le joueur à se questionner et peut l’interpeller sur n’importe quel sujet, quel qu’il soit. Car il va être implicitement immergé et impliqué à travers cette histoire, en s’interrogeant, en se remettant en question parce que le joueur sait pertinemment que ses actes auront des conséquences par la suite et que celles-ci seront naturellement irrévocables. À plus forte raison que ses conséquences le concerneront lui ou son entourage fictionnel ; de ces conséquences naîtront naturellement des sentiments, des émotions. 



Au final peut-être s’agit-il tout simplement de « responsabiliser » le spectateur pour le pousser à comprendre ce qu’il voit. L’interactivité peut être ici un moyen de responsabilisation très efficace ; elle donne au spectateur le texte — chargé d’une infinité de pensés, d’images, d’idées, d’émotions, d’humanisme – qu’il va manipuler en vue de s’en faire sa propre représentation. 


C’est là, un grand intérêt que porte un jeu comme Heavy Rain et le média en général. L’interactivité de la mise en scène du texte permet une lecture multiple et personnelle de l’œuvre. Le spectateur est libre de mener sa propre histoire, il l’a conduit là où il le souhaite. La fin du jeu sera le reflet de tous ses actes, l’ultime conséquence de ses choix. Il peut très bien ne pas en être satisfait et regretter ses choix, mais une chose est certaine, c’est qu’il en aura appris les conséquences et pu les visualiser. Il réfléchira et portera un regard d’ensemble sur tout ce qu’il aura vécu à travers l’intrigue, il n’en comprendra que mieux les messages, les idées et les problématiques posées par le texte. 



Le jeu vidéo est donc bien sûr lui aussi capable, de faire entrer le spectateur dans un univers narratif complexe et riche en émotions tout aussi bien que l’ont toujours fait et continuent de le faire, la poésie, le conte ou le théâtre. À certains égards, le jeu lui aussi, l’à d’ailleurs toujours été. Dès ses débuts, certains créateurs ont tout de suite décelé le potentiel créatif et artistique sans limites que pouvait offrir un tel média. Certains développeurs se sont posés comme de véritables artistes en proposant des jeux capables de créativité et d’innovation, déjà en marge avec les premiers standards de l’époque. Seulement à ses débuts, le jeu vidéo n’avait pas encore les moyens, ni les techniques nécessaires dont il dispose aujourd’hui, pour véritablement s’épanouir. Le jeu vidéo est assez mature et commence à peine à avoir les moyens techniques, pour assumer et exploiter pleinement son potentiel créatif et narratif. En un sens, le parcours historique des jeux vidéo et son évolution sont très similaires à celui du cinéma ou même de la bande dessinée. Avant de devenir ce qu’on nomme aujourd’hui le septième art, le cinéma a longtemps été lui aussi sous-estimé et considéré comme un simple divertissement qui ne valait pas que l’on s’y attarde plus que ça. La technique n’était pas encore au point, le son n’existait pas, la couleur non plus et personne n’aurait imaginé que l’on puisse y raconter par son biais, de riches histoires. 

Pourtant, lorsque l’on étudie et observe attentivement son parcours, on se rend compte que certaines personnes déjà à l’époque étaient capables de faire preuve de créativité et de narration, parfois juste en se contentant de filmer des prises de vues sous différents angles, différents cadres, le tout en noir et blanc. Aujourd’hui, plus personne n’oserait dire que le cinéma n’est pas un formidable support artistique et créatif inépuisable, n’attendant que d’être exploré. Si le jeu vidéo n’est pas pleinement considéré comme un véritable support créatif, comme un art véritable, c’est aussi parce qu’il s’agit d’un média encore très jeune, souvent incompris et qui n’a peut-être pas encore fait suffisamment ses preuves aux yeux de tous, comme l’a fait le cinéma il y a longtemps maintenant. Mais ce n’est qu’une question de temps, il faut espérer que de plus en plus de jeux proposeront autant de narration et de poésie que le font des arts comme le cinéma ou la littérature, de montrer ce dont est capable le média quand il s’agit de raconter de grandes histoires extraordinaires et intemporelles. Il est en tout cas certain qu’à un moment donné ou un autre, le jeu vidéo se devra de grandement bouleverser quelques codes et fondements qui lui sont propres pour prétendre enfin, à une véritable reconnaissance artistique ou la confirmer tout du moins ; le poids économique de cette industrie pesant énormément aussi sur la crédibilité de ce média et ne l’aidant pas forcément à s’élever au rang d’art à part entière. Mais il y a fort à parier qu’il atteindra ce rang dans les prochaines années à venir notamment grâce à des jeux tels que Heavy Rain. 



  Il faudra désomais regarder du côté de ces jeux qui osent ne poser presque plus aucune frontière entre leur propre médium et celui des autres, ces quelques jeux parvenant à atteindre l’intermédia et réussissant à toucher quelque chose de la vie. Aujourd’hui le jeu vidéo est en passe, à l’ère des technologies nouvelles, de devenir ce qu’il a potentiellement toujours été : un inépuisable support créatif et un moyen d’expression, tout aussi puissant que peut l’être n’importe quel autre art. Un art qui néanmoins, pour parvenir à une reconnaissance universelle, a encore du chemin à parcourir et beaucoup à apprendre de ses ainés; car l'avenir du jeu vidéo s'étend bien au delà de ses propres frontières.


Thomas BOUCHER.

Sources : L’art du game design, de Jesse Schell.
Statement of intermedia, Dick Higgings.

2 commentaires:

Experience a dit…

Pour moi, Heavy Rain est un mauvais exemple, pour la simple et bonne raison qu'il emprunte trop au cinéma, et est plus un film interactif qu'un jeu.
Lorsque je me mets à parler de jeux vidéo en temps qu'art, je préfère personellement évoquer les jeux qui transmettent des émotions par leur simple gameplay ou level-design (Ico, SoTC, Flower, Journey).

Tom a dit…

Salut et merci pour ton commentaire !

Tu as raison de dire que les plus belles oeuvres vidéoludiques puisent généralement leurs forces dans les techniques qui lui sont propres, je le souligne d'ailleurs très fortement avec ICO plus haut dans l'article, mais pas seulement. Se limiter au gameplay ou au level design pour parler d'art dans un jeu vidéo revient à restreindre fortement tout le reste de son potentiel artistique.

Mais là, il me semble que c'est plus une affaire de goût qu'autre chose pour toi : )

Par ailleurs, la question que j'essaye de soulever ici est justement de ne pas savoir qui est un bon exemple ou non, mais plutôt de mettre en lumière de quelle façon certain jeu parvient à voir au-delà du pur divertissement numérique et des techniques qui lui sont propres.

Et c'est en ce sens que, pour moi, au contraire, Heavy Rain est un très bon exemple dans la mesure ou il transcende ses propres frontières médiatiques pour allez vers quelque chose de différent.

Tu parles de film interactif à juste titre, la question de savoir si Heavy Rain tend plus à l'univers cinématographique qu'à celui du jeu peut se poser. Sans vouloir rentrer dans ce débat, je dirais qu'il appartient au deux.

En tout cas, il permet au média d'évoluer et d'élargir son horizon artistique tout en ayant permis d'ouvrir la voie à d'autres jeux-films souhaitant explorer le genre.

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